Les électeurs turcs ont voté pour choisir les nouveaux maires de 81 villes dans le pays dimanche 31 mars 2019. Le parti islamo-conservateur qui dirige la Turquie depuis 2002, l’AKP (Parti de la Justice et du Développement) a remporté 44.42 % des voix et a fini l’élection le premier parti comme toujours. L’AKP a remporté 39 villes au total. Le parti social-démocrate et séculaire, le CHP (Parti républicain du peuple) est devenu le deuxième comme d’habitude avec 30.07 % des voix et a gagné l’élection dans 21 municipalités. Alors à la première impression, on peut dire qu’il n’y a pas un changement grave pour la politique turque parce qu’il y a encore 14 points de différence entre l’AKP et le CHP. Mais le fait choquant pour ces élections c’est la perte de l’AKP des deux plus grandes villes de la Turquie Istanbul et Ankara. Le CHP a réussi à gagner les trois plus grandes villes développées dans le pays (Izmir aussi) avec des candidats jeunes comme Ekrem İmamoğlu et Tunç Soyer.
Les résultats d’élection
Le MHP (Parti d’action nationaliste), parti de droite et ultranationaliste, a eu 7.25 % des voix et a réussi à gagner dans 11 villes. Le Bon Parti (İYİ Parti) a remporté 7.46 % des voix mais a gagné aucune municipalité. Le parti pro-kurde, le HDP (Parti démocratique des peuples) a remporté seulement 4.22 % des voix cette fois-ci et a réussi à gagner 8 municipalités. On doit dire que comme le MHP, le Bon Parti et le HDP ont fait des pactes électoraux avec l’AKP ou le CHP, leur vrai potentiel de vote est beaucoup plus important. En plus, à Tunceli, le candidat du parti communiste turc (TKP), Fatih Mehmet Maçoğlu a gagné. A Kırklareli aussi, le candidat indépendant Mehmet Siyam Kesimoğlu a été élu.
La carte électorale
La plus grande surprise a eu lieu à Istanbul, le cœur économique de la Turquie. Le candidat de CHP, Ekrem İmamoğlu a été élu contre le candidat favori de l’AKP, Binali Yıldırım. C’était une victoire historique comme les maires d’Istanbul venaient toujours des partis islamistes depuis 1994. İmamoğlu était un politicien inconnu il y a trois mois mais maintenant il est l’un des acteurs politique plus importants de la Turquie car il va diriger Istanbul ; une ville plus grande (en puissance économique et en population) que beaucoup de pays en Europe. A Ankara, le CHP a gagné avec Mansur Yavaş, un candidat nationaliste venant de la tradition politique de MHP. A Ankara aussi, les islamistes étaient au pouvoir depuis 1994. Mais la victoire de Mansur Yavaş n’est pas une surprise du tout car le choix Mehmet Özhaseki (l’ex maire de Kayseri) était une faute. Les électeurs turcs insistent pour des candidats locaux spécialement pour les élections municipales. Alors l’AKP a donné Ankara sur un plateau. A Izmir aussi, le CHP a eu une victoire comme toujours. Le candidat de CHP, Tunç Soyer a remporté presque 58 % des voix et a gagné facilement contre Nihat Zeybekçi. Le CHP a aussi gagné des villes importantes et développées comme Mersin, Adana, Antalya, Hatay, Muğla, Aydın et Eskişehir. Le parti social-démocrate et séculaire a aussi réussi à progresser dans la région de la mer noire en gagnant les municipalités de Sinop, Ardahan et Artvin.
Les nouveaux maires de CHP : Tunç Soyer, Mansur Yavaş et Ekrem İmamoğlu
Quand on fait l’analyse des élections locales en Turquie, on doit dire que le CHP est le seul vainqueur des élections en temps que parti pro-séculaire et pro-européen qui a gagné le contrôle des villes les plus développés et a donné un signal fort pour devenir le premier parti aux prochaines élections présidentielle et parlementaire. L’AKP a perdu beaucoup de prestige après avoir été battu à Istanbul et Ankara, mais avec le MHP, Monsieur Erdoğan protège encore sa base électorale de 52 %. Le journal français Le Monde a expliqué la chute d’Erdoğan avec la phrase « L’électorat a tiré les oreilles de l’AKP ». La crise économique et la dévaluation de la livre turque sont les causes de la réaction de l’électorat contre Monsieur Erdoğan et son parti. Mais Erdoğan a encore 4 années au palais présidentiel à Ankara et selon le calendrier politique régulier et s’il peut améliorer l’économie turque, il est toujours le candidat favori contre les candidats potentiels de CHP comme Kemal Kılıçdaroğlu ou Muharrem İnce. La chute du parti pro-kurde le HDP n’est pas une coïncidence car l’état turc veut diminuer l’effet de ce parti et l’absence de Selahattin Demirtaş a été ressentie fortement. Le MHP a augmenté le nombre des villes dirigées mais ce parti doit toujours supporter un candidat fort aux élections présidentielles à cause de sa base électorale limitée. Les élections ont assuré les sièges des leaders de quelques partis : Monsieur Kemal Kılıçdaroğlu pour le CHP et Monsieur Devlet Bahçeli pour le MHP. Mais les délégués du Bon Parti peuvent changer leur leader Madame Meral Akşener pour l’élection prochaine car le parti n’a pas pu faire l’évènement qu’elle a promis.
Monsieur Erdoğan est en difficulté maintenant
Le résultat de ces élections peut obliger Monsieur le Président à limiter l’opération militaire qu’il a annoncé dans quelques mois contre les militants kurdes de PYD et YPG en Syrie. Les opérations militaires de l’armée turque sont toujours appuyées par le peuple turc mais pendant une crise économique, les dépenses militaires en augmentant peuvent causer des réactions. La Turquie doit aussi réajuster sa politique étrangère attentivement, pendant cette nouvelle période, avec les Etats Unis, l’Union Européenne et la Russie. Une solution politique à la crise syrienne sera le point culminant pour Ankara pour recommencer son élargissement économique. Dernierement, les élections municipales en Turquie ont montré que la démocratie turque est encore vivante.
Correcteur d’orthographe et de grammaire: Françoise Barere Yörük
Dr. Ozan ÖRMECİ